lundi 20 avril 2009

L'aéroplane

Prends-moi la main et jure-moi de me suivre jusqu’au bout du monde.

Alors, un de ces quatre matins, tu me verras arriver sur les Plaines d’Abraham dans mon biplan. Tu sais, un de ces vieux aéronefs à deux places avec deux grandes ailes en toile, l'une sous la carlingue et l'autre au-dessus. Un oiseau magnifique.

Tu te seras habillée à la mode des aviatrices des années 20: un pantalon bouffant (des «breeches») beige, avec un court blouson de cuir brun et de longues bottes lacées, collées sur les jambes. Tu auras un couvre-chef d'aviateur, en cuir également mais plus foncé, moulant la tête et solidement retenu par une longue ganse passant sous le cou. Tu porteras aussi de bons gants, de même couleur que ton couvre-chef. Je serai habillé de la même façon, mais toi tu auras un grand foulard de soie enroulé autour de ton cou et qui pendra dans ton dos. Rose, je crois, ce foulard.

Avant de monter à bord, tu te posteras à l'avant de l'appareil, tu empoigneras des deux mains une pale de l'hélice et, d'un vigoureux mouvement, tu amorceras l'engin. Je t'aurai prévenue de faire bien attention pour ne pas te casser un bras et pour ne pas, non plus, laisser l'hélice happer ton foulard lorsque, dans un bruit de tonnerre, elle se mettra à tourner follement.

Puis, contournant les ailes, tu t'approcheras de la cabine et, levant la jambe bien haut pour t'appuyer le pied sur l'aile du bas et t'agrippant des deux mains à la carlingue, tu grimperas alors à l'avant. Moi je me serai déjà installé à l'arrière pour la manœuvre d'amorçage. C'est la place du pilote sur ces vieux modèles. Je te crierai de bien t'attacher. On doit crier car le moteur est très bruyant et, au surplus, la cabine n'est pas fermée. Le corps est à l'air libre. C'est pour cela qu'on doit porter de grosses lunettes d'aviateur attachées derrière la tête par une bretelle et s'habiller chaudement.

Lorsque tu seras bien installée dans ton siège, je tournerai notre vieux zinc pour le mettre face au vent.

Avant de décoller, je t'aurai invitée à te recueillir avec moi un moment pour nous plonger dans un état d'esprit de réconciliation avec nous-mêmes et avec tout l'univers. Car je pense, à l'instar de beaucoup de grands maîtres à penser de l'Orient, que la communion d'esprit avec l'univers est la clef qui permet d'en pénétrer les secrets et même d'en contrôler les forces.

Car, et cela je ne te l'avais pas dit, pour voler dans mon aéroplane, il faut être un brin thaumaturge. Attends un peu et tu verras ce que je veux dire.

Nous en sommes donc rendus au point où j'aurai tourné mon appareil nez dans le vent. Comme ce vent sera un vent d'est, j'aurai roulé jusqu'à l'extrémité ouest du champ de bataille qui borde le musée. Il faut toujours, comme tu le sais sans doute, décoller le «nez dans le vent». Je mettrai alors le pied sur le frein, enclencherai l'embrayage et pousserai à fond la manette des gaz. Le moteur rugira et l'appareil vibrera. À partir de là, n'essaie même plus de me parler. On ne s'entendra pas.

Nous serons donc là, pleins gaz, le nez agressif, bien droits sur nos roues, comme le fauve prêt à bondir sur sa proie mais tenu fermement en laisse par son maître. Je lâcherai les freins. Notre engin s'élancera à l'instant même où la police des Plaines arrivera en courant, gesticulant pour nous interdire de décoller.

Notre tarmac de fortune est plutôt cahoteux et ça bringuebalera ferme dans le cockpit. Heureusement que j'aurai pris la précaution d'installer un petit coussin sur ton siège car je t'aurais démoli l'arrière-train.

C’est à ce moment que la situation se corsera. Nous serons face au musée, à l'autre bout du champ. À vue de nez, je dirais que notre piste d'envol n'a pas beaucoup plus de 150 mètres. Il faudra donc s'élever rapidement si on ne veut pas aller étêter les grands arbres qui bordent le champ et s'écraser piteusement sur le toit du musée. Or, notre vieux coucou n'est ni un hélicoptère ni un de ces avions à décollage vertical que l'on connaît de nos jours. Il a beaucoup de courage mais c'est toujours à grand-peine qu'il s'arrache au sol. Alors, décoller sur une piste de 150 mètres, disons le tout net, c'est tout à fait impossible! À moins, et là je pèse bien mes mots, à moins, dis-je, d'un miracle!

C'est là qu'interviendra l'esprit de communion avec l'ensemble de l'univers dont je te parlais tantôt. Nous nous serons recueillis pour bien sentir notre aéronef, faire corps avec lui et, plus que cela: devenir l'aéronef. Là, il faudra nous imaginer, décollant du sol et entraînant notre aéronef. Avec un tel état d'esprit, rien n'est impossible: après avoir parcouru 30 mètres tout au plus, le nez de notre appareil se dressera à presque 45o et nous nous élèverons, sous le regard ébahi des patineurs évoluant sous nos yeux, pour aller survoler le musée, virer avec élégance sur l'aile droite et nous diriger vers le fleuve.

Nous décrirons alors un grand S pour venir nous poster au-dessus du fleuve en direction est et garder le nez au vent, tout en prenant de l'altitude. Nous suivrons alors le cours du fleuve, survolerons l'île d'Orléans, l’île aux Coudres et l’île Verte et garderons le cap jusqu’aux Escoumins.

Pour te familiariser avec l'appareil et dissiper tes craintes, je le ferai basculer sur l'aile gauche, puis sur l'aile droite. Tu nous verras ainsi décrire de longues courbes au-dessus du fleuve, des virages, très doux au début puis de plus en plus accentués, qui te feront pousser de petits cris. Mais tu t'y feras vite et c'est alors que je te proposerai quelques manoeuvres un peu plus osées. Je te parlerai à l'aide d'un walkie-talkie que j'aurai pris soin d'apporter. Tu tourneras vers moi un regard un peu craintif et je clignerai des yeux pour te rassurer et te dirai de te sangler solidement. Nous entreprendrons, graduellement faut-il le dire, des tonneaux enchaînés, des montées vertigineuses et des descentes en vrilles, moteur éteint. Je sourirai en t'entendant pousser des cris aigus de frayeur qui feront bientôt place à tes fous rires.

Toutes ces cabrioles nous amèneront à la fin du jour. Je virerai alors cap à l'ouest pour voler droit vers le soleil qui baissera sur la ligne d'horizon.

Écoute, je te concède que mon appareil est assez bruyant et peu confortable même si, comme je te l’ai dit, j’aurai pris soin de glisser un petit coussin sous tes fesses. Par contre, il faut le voir pour ce qu’il est : un oiseau de rêve. Une fois élancés dans les airs, il s’agit d’oublier la terre et ses tracasseries, petites et grandes. Se concentrer sur la beauté des ailes de libellule de notre engin, la délicatesse de la membrure qui sous-tend sa voilure, son courage de tenir l’air malgré sa fragilité. Puis, porter son regard sur le ciel tout autour et éprouver jusqu’au fond de ses tripes un incomparable sentiment de liberté. Se détendre de la pointe des cheveux jusqu’au bout des orteils et sentir qu’on ne fait qu’un avec l’univers, que l’appareil pourrait s’évanouir et qu’on continuerait de flotter indéfiniment. Sentir une paix suprême et une joie sans ombre nous envahir.

Je te dirai de fermer les yeux et te raconterai que nous irons sillonner les replis du firmament. Que, la nuit venue, nous monterons droit vers les étoiles. Que nous louvoierons entre les galaxies, évitant soigneusement les trous noirs, ces impitoyables dévoreurs. Que nous découvrirons de nouveaux mondes et planterons nos drapeaux sur de jeunes planètes.

Je t'expliquerai aussi que la force d'attraction des astres que nous côtoierons nous propulsera graduellement à la vitesse de la lumière. Et qu'alors, comme nous l'a promis Einstein, le temps qui nous enveloppe se déformera. Que nos jours s'étireront, que nous cesserons de vieillir et que, projetés dans le passé, je crois même que nous rajeunirons.

Pour ce qui est de visiter le pays du Bon Dieu dont tu me parles si souvent, ça aussi notre biplan peut nous y amener. Mais il faut être prêt à un grand sacrifice : celui de la vie. Il suffit de couper les gaz, de planer un petit moment en se laissant porter par notre élan, puis se mettre à piquer du nez et entrer dans une vrille spectaculaire et enivrante, pour finalement s’écraser dans un champ de patates du comté de Portneuf. Là, quand tu sors de l’aéroplane, tu as l’impression de marcher dans la mousse. Tu te frottes un peu les yeux puis tu te rends compte que tu es passée de l’autre bord de la clôture et que tu patauges dans les nuages en t’enfonçant jusqu’aux cuisses. Le temps de te mettre les mains en visière pour te protéger du soleil éblouissant et, peu à peu, tu te rends compte que cette lumière aveuglante, ce n’est pas le soleil. C’est le Bon Dieu lui-même en personne, assis là-bas sur un gros nuage blanc. Il te regarde d’un air attendri et un peu moqueur pour te dire que ce long et parfois difficile voyage sur terre n’était qu’un bon tour qu’il t’avait joué. Puis, te remettant peu à peu de tes émotions, tu verras apparaître, quelque peu vaporeux au début mais de plus en plus définis au fur et à mesure que ton cœur menacera d’éclater, tous ces amis et ces amours de ta vie passée, regroupés là pour t’accueillir dans leurs bras.

C'est ainsi, qu'à la fin du voyage, je t'emmènerai, si tu le veux, de l'autre côté du temps, pour visiter ceux qui sont partis et ne sont jamais revenus. Peut-être ne reviendrons-nous jamais nous non plus. Et pour cause. Oserai-je t'avouer qu'en faisant toutes nos pirouettes nous aurons perdu notre train d'atterrissage?

Peu nous importera. Nous n’aurons peur de rien car nous aurons vingt ans et nous nous tiendrons par la main.

Qui donc a fabriqué l'univers?

Mes ancrages - Capsule No 4

Qui donc a fabriqué l’univers?

Si on s’en remet à la Bible, c’est le Dieu tout-puissant des Juifs et des Chrétiens qui, comme l’explique la Genèse dans un langage fort poétique, s’est lancé un bon matin dans un bricolage de tous les diables (oups! peut-on parler ainsi de Dieu?) pour créer les eaux, la terre, la lumière, les animaux, les plantes, bref, toute la création et terminer par ces deux chefs d’œuvre que sont l’homme et la femme.

Aujourd’hui, nous avons assez de maturité pour savoir qu’il s’agit d’une narration poétique qu’il ne faut surtout pas lire comme un récit historique. Alors, comment s’est donc passé ce commencement des temps?

Pour tout dire, on n’en sait rien.

La théorie qui prévaut de nos jours est celle du Big Bang : un vide total de matière ne laissant place qu’à l’énergie qui, soudain, se transforme en matière (c’est Einstein qui nous a appris que l’énergie peut se convertir en matière). Mais une matière informe, chaude et aveuglante où des particules furieusement agitées se livrent une lutte à finir dont les survivantes se disperseront à des vitesses foudroyantes pour remplir le vide de l’espace où, après des millions d’années, elles finiront par s’agglutiner pour former de vastes amas de gaz et de poussières (les galaxies) où germeront les étoiles et les planètes.

Dieu de dieu, direz-vous, redites-moi ça un peu. C’est là une histoire encore plus incroyable que celle de la Bible, non? Non!

On sait ces choses parce qu’un de ces jours un dénommé Hubble (dont le télescope spatial porte le nom) a découvert que les vastes troupeaux de galaxies qui peuplent le ciel s’éloignaient les unes des autres à des vitesses incroyables. On s’est alors dit que, si on tournait le film à l’envers, toutes ces galaxies et les astres qui les peuplent ont bien dû, un bon jour, se retrouver regroupées en un seul point.

Cette théorie sur un univers en fuite depuis l’explosion du Big Bang a soulevé bien des controverses comme on peut l’imaginer car, depuis Aristote, on croyait que l’univers était figé. Mais les découvertes ultérieures (dont je reparlerai peut-être un jour dans une de mes capsules astronomiques) ont prouvé que la théorie du Big Bang avait des fondements solides.

On sait donc (du moins jusqu’à preuve du contraire) que notre univers est germé de rien ou, plutôt, d’une énergie qui s’est convertie en matière. On sait aussi (comme nous l’avons vu dans les capsules précédentes) que toute la matière (y compris nos propres corps) est faite d’atomes et que ces atomes ont presque été tous forgés au cœur des étoiles.
Mais, pour en revenir à nos moutons, d’où donc est venue cette énergie qui a donné naissance à la matière?

Ça, on n’en sait rien.

Questions subsidiaire : comment se fait-il que cette matière, si informe à ses débuts, ait fini par s’organiser jusqu’à créer des plantes, des bêtes et même des êtres humains dotés d’intelligence et de conscience?

Eh bien, Darwin est venu nous apprendre que ce sont les lois de l’évolution qui, par un processus de sélection naturelle, ont permis à la matière de s’organiser ainsi. Mais qui donc fait jouer ces lois de l’évolution?

Ça, on n’en sait rien non plus.

Mystère, mystère, mystère!

Ne manquez pas la suite de cette palpitante aventure de l’homme sur son fragile esquif. Cette suite viendra un de ces jours où je me lèverai du bon côté du lit.

samedi 18 avril 2009

La chevauchée fantastique

mercredi 10 décembre 2008

La chevauchée fantastique

Piaffant d’impatience
Queues battant les flancs
Nos chevaux nous attendent

D’un seul et même élan
Nous sauterons à la croupe
De ces coursiers fougueux

Les monterons à cru
Pour partir au galop
Conquérir l’univers
D’étoiles en étoiles
Au bruit de leurs sabots

Les astres éclatant
Et faisant jaillir
Des gerbes d’étincelles
Sous nos pas fracassants

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 17:27 1 commentaires

La passe-murailles

Lettre à mon petit-fils
lundi 8 décembre 2008

Mon cher Yannick,
Ce matin, laisse-moi te conter la dernière cascade de ta grand-mère.

Aventurière comme tu la connais, elle a voulu tenter le coup du passe muraille. Alors, l'autre nuit, elle a commencé par une tentative de guidage grâce aux ondes du cerveau. Donc, lorsqu'elle s'est levée pour ses besoins nocturnes, elle s'est dirigée vers la salle de bains, les yeux fermés bien durs. Ça a très bien fonctionné, même qu'elle a fait la chose en plein dans le mille.

Rendue téméraire par ce premier succès, elle a entrepris le retour en montant d'un cran le niveau de difficulté: elle a décidé de jouer les passes murailles. Toujours les yeux fermés, elle a mis le cadre de porte au défi de l'empêcher de passer. Tu connais les cadres de porte, n'est-ce pas? Ce ne sont pas gens à plier l'échine facilement. Le choc fut terrible. Un-zéro pour le cadre de porte. En plein dans l'oeil gauche. Une telle violence, c'est à se demander si le cadre de porte n'avait pas pris son élan.Le résultat: un oeil gauche noirci, bleui, plissé, enflé, poché, bref amoché. Un microcosme de Nagasaki après la bombe.

Cet affrontement n'a toutefois pas eu que des désavantages. En premier lieu, ça a permis à ta grand-mère de s'acheter une sixième paire de lunettes pour cacher le cratère.Puis, aussi, elle a reçu un appel du Metropolitan Opera de New York. Le Met voudrait qu’elle vienne à New York faire photographier son œil pour le projeter sur écran géant pendant que le ténor chanterait l’air du toréador de l’opéra Carmen :Toréador, prends gar-ar-ard'à toi Un oeil noir te regarde ...«L'oeil noir», tu t'en souviens, c'est celui du taureau. Je pense qu'elle va refuser. Elle trouve que New York est une ville trop dangereuse avec tous ces chauffeurs de taxi qui roulent à des vitesses folles. Elle préfère la sécurité de son foyer ...

Elle a aussi reçu des appels de plusieurs plasticiens. Ta grand-mère a de beaux yeux verts, comme tu sais. On lui demande des photos de son œil d’avant l’accident et des photos de son œil dans son état actuel. On en ferait un montage du genre AVANT - APRÈS pour montrer son œil «avant et après» et illustrer ainsi les miracles de la chirurgie esthétique. Sauf que, dans la pub télé, l’«AVANT» paraîtra survenu avant l’«APRÈS» alors que, dans les faits, cet «AVANT» est survenu après l’«avant» bien évidemment. Me suis-tu? Mais tout ça m’importe peu car ce n’est qu’un trauma qui disparaîtra rapidement et l’après sera comme avant.

Ta grand-mère dit que je passe mon temps à compliquer les choses. N’en crois rien. C’est elle après tout qui se prend pour Don Quichotte et se lance à l’assaut des cadres de porte.

Je te serre dans mes bras,
Grand-papa
Publié par Jean Marcoux à l'adresse 10:13 3 commentaires:
Macacus (alias Yannick) a dit…Grand-papa!Je prends le temps de te lire au détour d'une page de Jean Basile. J'adore ton idée du blogue: c'est un de plus, mais c'est mon préféré. C'est que grand-maman est une Don Quichotte, et puis il y a un détail du quotidien qui me rapelle Francis Ponge: as-tu déjà lu "Le parti pris des choses"? Magnifique.Le monde est beau cette semaine, notre petit monde qui spine dans sa galaxie perdue; y'a de la douceur dans la neige qui tombe et de l'espoir dans les bras levés d'Amir Khadir. Je suis heureux, et d'autant plus de lire que vous l'êtes tout autant.J'ai hâte de vous voir, je t'embrasse.YannickP.S. J'adore "Les petits papiers"10 décembre 2008 15:29

Macacus (alias Yannick) a dit…Encore un petit quelque chose. Je viens de tomber sur un passage intéressant et, il me semble qu'en ces temps creux de l’ère Harper, une petite poussée dans le dos pour réfléchir – ou à tout le moins valoriser – la culture fait le plus grand bien. Voici.Paul Dumas, dans Lyman :« L’on se plaît à répéter dans certains ateliers que la culture nuit à l’expression artistique en interposant des réminiscences et des éléments hétérogènes entre le créateur et son œuvre. C’est là se méprendre sur le vrai sens de la culture. Celle-ci ne consiste pas, comme on le pense trop souvent en Amérique, dans une érudition de surface ou dans un savoir encyclopédique, mais elle découle d’une assimilation des notions fournies par l’étude et l’expérience. Fondée sur la réflexion et non sur la mémoire, elle est en somme un enrichissement personnel qui affine, aiguise et assouplit les facultés de l’homme. »Yannick (bis)XX

Les petits papiers

Les petits papiers
mardi 25 novembre 2008

Les petits papiers
Qu'on a froissés
Roulés en boules
Et puis jetés
Parlaient parfois
D'amour et d'amitié

Parfois aussi
Ils racontaient
L’immensité
Des galaxies
Ou la beauté
Des soirs d’été

Et maintenant
Ils dorment là
Recroquevillés
Dans nos paniers

Espérant sans le dire
Qu'une main secourable
Viendra les repêcher
Pour les défroisser
Et leur redonner vie

Peut-être alors
Des doigts habiles
Tiens, ceux d'un enfant
Les façonneront
Pour les profiler
En avions long-courriers

Qui partiront
Par les fenêtres
Porter leurs messages
Aux confins de la terre

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 08:38 0 commentaires

La chevauchée fantastique

mercredi 10 décembre 2008

La chevauchée fantastique

Piaffant d’impatience
Queues battant les flancs
Nos chevaux nous attendent
D’un seul et même élan
Nous sauterons à la croupe
De ces coursiers fougueux
Les monterons à cru
Pour partir au galop
Conquérir l’univers
D’étoiles en étoiles
Au bruit de leurs sabots
Les astres éclatant
Et faisant jaillir
Des gerbes d’étincelles
Sous nos pas fracassants

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 17:27 1 commentaires

Capsule astronomique No 5

Enquête policière : qui fait bouger les étoiles?
jeudi 12 février 2009

«Mais comment donc, se sont demandé les Anciens, toutes ces étoiles et tous ces astres font-ils pour tourner ainsi autour de la terre?» car il était bien évident que la terre était au centre de l’univers et que c’était le ciel qui tournait. On a imaginé toutes sortes d’explications mais c’est le brave saint Thomas d’Aquin qui, en fin de compte, a fourni la réponse indiscutable : ce sont les anges qui, du battement de leurs ailes, poussent les astres pour les faire tourner. Voilà, tout était dit…jusqu’à ce qu’un moine polonais du nom de Copernic avance timidement l’hypothèse que c’était peut-être la terre qui tournait. Pour ne pas subir les foudres du Vatican, il eut la prudence de ne faire publier sa théorie que le jour de sa mort.

Mais l’italien Galilée prit la balle au rebond et, après de longues nuits d’observation du ciel avec sa lunette astronomique, se mit à claironner imprudemment que la terre tournait autour du soleil et non l’inverse. Coup de tonnerre au sein de l’Église : la Bible disait clairement que Dieu avait arrêté le soleil pour permettre à Josué de poursuivre et exterminer ses ennemis avant la fin du jour. Il était donc bien évident que c’est le soleil qui tournait. C.Q.F.D. Et la Sainte Inquisition força Galilée à s’amender. (Il est amusant, à cet égard, de noter que ce n’est qu’en 1992 que Jean-Paul II a réhabilité Galilée).

Essentiellement, Copernic et Galilée disaient que c’était le soleil qui était au centre de l’univers (héliocentrisme) et non la terre (géocentrisme). Cette affirmation faisait aussi scandale car, non seulement elle contredisit la Bible, mais elle laissait entendre que l’homme n’était pas le nombril de l’univers, thèse sur laquelle reposait l’édifice du christianisme.

Si révolutionnaire que fut la théorie de l’héliocentrisme, elle nous fait sourire aujourd’hui alors que nous savons que le soleil n’est qu’une banale étoile perdue dans l’univers qui n’a pas vraiment de centre.

N’empêche que, au-delà de leur valeur scientifique, les découvertes de Copernic et Galilée constituaient une véritable révolution culturelle : elles annonçaient que les phénomènes célestes n’étaient pas régis par les dieux comme on le croyait depuis Aristote mais que ces phénomènes avaient des causes naturelles que l’homme pouvait arriver à comprendre s’il se donnait la peine de les observer et d’en rechercher les causes. Ce fut une révolution à la fois scientifique et culturelle qui s’attira les foudres de l’église mais aussi des milieux conservateurs chez les soi-disant esprits scientifiques de l’époque.
Publié par Jean Marcoux à l'adresse 11:36
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Capsule astronomique No 4

Les grandes illusions
Dimanche 8 février 2009

Si, toujours durant cette même nuit étoilée, vous levez les yeux vers le ciel, vous vous écrierez sans doute : «Voyez la paix, le calme, la stabilité de ce ciel. Les étoiles conservent éternellement leur rang les unes par rapport aux autres. Le basculement de la terre peut, au gré des saisons, faire apparaître ou disparaître des constellations, mais les étoiles elles-mêmes sont immobiles et silencieuses… Erreur!

Les étoiles sont lancées dans une course folle. Elles nous paraissent immobiles parce qu’elles sont trop loin pour que l’on puisse, à l’œil nu, déceler leur mouvement. C’est un peu comme l’avion long-courrier qui, à une altitude de 30 000 pieds, vole à 7 ou 8 cents km/h et nous paraît se déplacer à la vitesse d’un escargot. Imaginez s’il était compagnon de voyage d’une étoile située à quelques années-lumière de nous et qu’un télescope de grande puissance pouvait l’apercevoir. À ces distances, il nous paraîtrait parfaitement immobile.

Et les étoiles ne se contentent pas de bouger. Elles grondent. Ce sont de hauts fourneaux qui consomment leur hydrogène et le convertissent en hélium dans un bruit d’enfer accompagné de fréquentes explosions. Les étoiles «chantent», comme disent les astronomes.

Très bien, elles bougent et grondent, direz-vous, et croire qu’elles sont immobiles et silencieuses est une illusion. Mais s’il y a une chose dont on peut être certain c’est que le ciel qui s’offre à notre vue n’est pas une illusion lui. Il est bien là, tel que je le vois.

Hélas, ça aussi c’est une illusion. Le ciel est menteur, on n’en sort pas. L’image que nous renvoie le ciel est fausse. Le ciel n’est définitivement pas ce qu’il paraît être. Et ceci parce que les étoiles qui nous paraissent toutes sur le même plan voguent en fait sur des plans différents. Deux étoiles, par exemple, peuvent nous paraître voisines alors que l’une est à cent années-lumière de nous et que sa voisine est cinquante mille années-lumière. Le rayon lumineux de la première est parti de son étoile il y a cent ans alors que le rayon lumineux de la seconde est parti il y a cinquante mille ans. Elles ont sans doute fait beaucoup de chemin depuis toutes ces années et l’une d’elles (ou peut-être les deux) est peut-être même éteinte aujourd’hui. L’image d’étoiles voisines qui vient frapper ma rétine est une image faussée. L’image entière du ciel nocturne est une image faussée.

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 13:59 0 commentaires
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Capsule astronomique No 3


Nous sommes donc installés dans la Voie lactée et, lorsque nous levons les yeux vers le ciel étoilé, tous les astres qui s’offrent à notre vue, étoiles et planètes, font partie de notre Voie lactée (hors peut-être quelques lointaines galaxies que nous prendrons pour des étoiles). Si nous prêtons un peu attention à ce ciel étoilé, nous y décèlerons une bande blanchâtre qui le traverse de part en part. C’est d’ailleurs de cette bande que notre galaxie tient son nom de Voie lactée. C’est la grande multitude des étoiles concentrées au centre de la galaxie qui crée cette image d’une lisière blanche. C’est un peu comme si, dans une fête foraine, nous étions assis dans une grande et large roue illuminée de milliers d’ampoules. En regardant le carrousel par la tranche, la multitude des ampoules nous donnerait l’impression qu’elles se touchent toutes et forment une bande lumineuse continue. Par contre, nous distinguerions une à une les ampoules tout autour de nous. N’empêche que ces ampoules autour de nous feraient elles aussi partie de notre grande roue au même titre que les ampoules plus éloignées formant la bande lumineuse.


Si nous étions assis dans un siège au bas dela grande roue et regardions vers le haut, les lumières nous paraîtraient comme une bande lumineuse compacte.

Il est étrange de penser que, même si les étoiles de notre galaxie sont très éloignées les unes des autres, elles sont si nombreuses (quelques milliards) qu’elles finissent par nous donner l’image d’un bloc lumineux homogène au cœur de la galaxie.

Pour observer notre galaxie, nous sommes postés, avec le soleil et ses sept autres planètes, dans la banlieue de cette grande roue qu’est notre galaxie : un immense troupeau d’étoiles de cent années-lumière de longueur et trente années-lumière d’épaisseur.



Voie lactée – vue d’artiste

Note : On ne peut évidemment pas photographier la Voie lactée car nous sommes à l’intérieur, perchés sur l’un de ses bras en spirales.

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Capsule astronomique No 2

L'immensité de l'univers (suite)
Capsule astronomique No 2
lundi 1er décembre 2008

La Voie lactée
Le soleil, comme on le sait, est une étoile. Une étoile de taille moyenne qui circule dans le ciel avec sa cohorte de huit planètes (y compris la terre) qui gravitent autour d’elle. Notre étoile fait partie d’un vaste troupeau d’étoiles rassemblées dans un enclos qu’on appelle galaxie. Notre galaxie porte le nom de Voie lactée.

Ce troupeau d’étoiles est si immense que si l’on pouvait monter à bord d’une navette spatiale et s’élancer à la vitesse de la lumière, il nous faudrait environ 100 000 ans pour la traverser de bout en bout. Il faut se souvenir à cet égard que la lumière voyage à 300 000 km/s (kilomètre par seconde), ce qui veut dire que la lumière fait sept fois le tour de la terre en une seconde.

Et, dans notre incroyable périple, nous croiserions quelques milliards d’étoiles (de 2 à 5 milliards, dit-on). Même si ces étoiles sont regroupées en un troupeau, les distances entre elles sont phénoménales, du moins suivant nos échelles de valeur. Au point que l’on calcule ces distances non pas en kilomètres ou en milles mais en années-lumière, c’est-à-dire en se basant sur la distance que franchit la lumière en une année (dix mille milliards de kilomètres). Ainsi, l’étoile la plus proche du soleil («Proxima du Centaure») est à 4,3 années-lumière de celui-ci. C’est une voisine. Certaines des quelques milliards d’autres se baladent à 100, 1000, 10 000, 50 000 années-lumière et plus.

Et, dans tout ça, il ne faut pas oublier que nous sommes toujours dans l’enclos que constitue notre galaxie. Si on franchit la barrière de l’enclos pour jeter un coup d’œil à l’extérieur, bien là le tournis est garanti car il y a plus de 100 milliards d’autres galaxies dans notre Univers de démesure. Nous y reviendrons un autre jour. Pour l’instant allons dormir sur ces chiffres époustouflants.


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Capsule astronomique No 1

20 novembre 2008

L'immensité de l'univers

Si, par une nuit noire, vous vous avancez au milieu d’un grand champ et que vous levez les yeux, vous serez bien sûr ébahis par la beauté du ciel étoilé et vous vous écrierez peut-être «Ah voilà l’Univers!». Erreur!

La voûte étoilée que vous avez sous les yeux, si immense puisse-t-elle vous paraître, n’est qu’un tout petit, vraiment tout petit, coin de l’Univers. Ce que vous voyez là n’est qu’un fragment de l’Univers.

C’est un peu comme si vous vous vous mettiez l’œil au trou de la serrure d’un grand château en vous imaginant que vous verriez là tout le château. Mais non, tout ce que vous verriez c’est un petit coin du portique d’entrée. Vous seriez loin de voir tous les étages et toutes les pièces du château, tous ses recoins, ses meubles somptueux, ses boiseries, ses tableaux, ses tapisseries, ses candélabres, bref toutes ses beautés.

Eh bien, l’Univers c’est ça : un monde de merveilles avec ses étoiles, ses galaxies, ses nébuleuses et ses planètes et tout ça dans une immensité sans nom, une immensité inconcevable. Et le ciel qui se révèle à vos yeux au milieu du champ où vous vous êtes aventurés n’en est qu’un tout petit coin perdu au milieu de cette immensité.

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mercredi 8 avril 2009

Notre île

Notre île

Cette année, c’est décidé, nous prenons nos vacances à l’île. Pas n’importe quelle île, notre île ! Vous nous connaissez n’est-ce pas ? Toujours en train de baguenauder, de traînasser à gauche et à droite, de rechercher des coins de pays dont ne parlent pas les guides touristiques : une éclaircie dans la forêt où poussent des bleuets gros comme le pouce, une vieille maison bleue cachée au bout du village et encerclé de pissenlits et de violettes, un petit bras de rivière où barbotent des crapets à l’ombre de grands saules, au détour d’une ruelle, une rangée de pyjamas colorés séchant sur une corde à linge pendue entre deux maisons, les vieux souliers accrochés au monument sur la tombe de Félix Leclerc … bref nous sommes des fouineux.

Et c’est ainsi que l’autre été, en ramant sur le fleuve, nous avons découvert notre île secrète. Pas grande je vous assure. On peut y tenir à dix mais pas plus. Ça fait rien nous sommes quatre avec les enfants. Il y a la visite mais bon, on leur dira de nager autour en attendant le souper.

Vous aimeriez bien que je vous dise où c’est. Ça non, je ne peux pas. D’abord parce que ce ne serait plus une île secrète mais aussi parce que, d’une fois à l’autre, on n’est jamais certain de la retrouver. C’est une île flottante. Et vous savez ce qui arrive aux îles flottant sur le fleuve. Eh bien, elles descendent avec le jusant et remontent avec le reflux. Vous dire la misère qu’on a eue à la retrouver d’une semaine à l’autre les premiers temps. Maintenant, ça va mieux car il y a les oiseaux. On se connaît bien maintenant les oiseaux et nous. L’île est pleine d’oiseaux, vous l’avais-je dit ? Deux variétés seulement, c’est pas difficile à retenir : des gros et des petits. Toujours est-il que, maintenant, les oiseaux nous connaissent et ils savent que nous apportons toujours une pochetée de croûtons et de moulée. Alors lorsqu’ils nous voient venir, ils s’installent au-dessus de l’île et ils piaillent à n’en plus finir. Comment on reconnaît que ce sont nos oiseaux ? Facile, je vous l’ai dit, il y a les gros et les petits.


J’aime bien que l’île demeure en place lorsque nous y allons et qu’elle ne passe pas son temps à se promener à gauche et à droite. Alors j’ai d’abord posé des rames sur la pointe de l’île. Cette pointe est si étroite que je peux m’y asseoir et ramer des deux mains. Une fois l’île ramenée en place, je l’ancre solidement à une tresse de joncs. Évidemment quand je quitte l’île, je la libère. Je suis anti-esclavagiste.

Il y a, il faut dire, les entre-saisons où l’on ne peut se rendre à l’île ni en chaloupe ni à pied sur la glace. Encore là, ce sont les oiseaux qui viennent à notre rescousse. Les gros seulement. En échange d’une double ration, ces messieurs et leurs dames accrochent solidement l’île dans leurs griffes et d’un merveilleux mouvement d’ensemble, ils arrachent l’île et la transportent jusqu’au plus proche rivage. Nous montons à bord et ils la retournent alors au mouillage en attendant notre signal de retour à la terre ferme.


Vous ne me croyez évidemment pas ? Eh bien, la prochaine fois que j’irai baguenauder, je vous amènerai. Avez-vous au moins une âme de traîneux, de vagabond, d’itinérant ? Sinon, allez vite vous en chercher une si vous voulez vraiment découvrir ce monde qui vous contient.

samedi 4 avril 2009

Le paradis perdu

Le paradis perdu
mercredi 21 janvier 2009

Dans un texte récent, mon amie Fernande Goulet dit: Il m'aura fallu tant de jours pour mieux saisir que tout ce qui s'inscrit dans le temps, à peine à la surface des choses, doit inexorablement basculer dans un autre espace: celui d'un passé irréductible.
Ce matin, cette pensée me rend nostalgique. Nostalgique de tous ces membres de ma famille. Ma mère qui nous couvait comme des poussins, mon père qui me promenait affectueusement sur ses épaules, mon frère, l'aîné, que j'admirais parce qu'il nageait comme un poisson, ma sœur que mon père appelait «ma noironne», mon grand-père, silencieux dans son fauteuil berçant, l'oncle Rosaire et sa joie de vivre, puis eux tous, mes autres oncles et tantes, Arthur le rigolard, Georges-Henri, le méticuleux, Éva, la pianiste, Félix à la chaude voix de baryton, Marthe, la naïve, Jeanne, la jolie femme, et aussi mes cousins et cousines, Jacques, l'amant de l'opéra, Julien, le joueur de tours, Mariette, l'affectueuse, et tous les autres, tous disparus aujourd'hui sauf mon frère Raymond, ma cousine Mariette et mon cousin Claude.
Je revois, me semble-t-il, toute cette joyeuse visite réunie à notre chalet une fin d'après-midi d'un samedi ensoleillé. Les hommes regroupés sur la berge qui surplombait la rivière, devisant et riant très fort à côté des garçons qui, des cailloux plein leurs poches, jouaient à celui qui lançait le plus loin tandis que ma mère et mes tantes, plus belles que jamais, le visage rougi par l'excitation et la chaleur du fourneau, s'affairaient à la cuisine. Et la jolie rivière qui coulait paisiblement vers un petit rapide quelques centaines de pieds plus bas.
Plus tard, on souperait joyeusement autour de la grande table et l'oncle Rosaire lancerait «Regardez, regardez!» en nous montrant du doigt la charrette à foin que le cultivateur avait arrêtée au milieu du rapide pour laisser boire ses chevaux dans la douce lumière de la fin du jour.
Après le souper, on jouerait aux fers et au jeu de poches au milieu des exclamations.
Avant d'entrer, dans le soleil couchant, l'oncle Félix chanterait:
«J'aime le son du cor, le soir au fond des bois
Soit qu'il chante les pleurs de la biche aux abois
Ou l'adieu du chasseur que l'écho faible accueille
Et que le vent du nord porte de feuille en feuille».
Après, on s'installerait tous sur la galerie grillagée et on allumerait les fanaux à l'huile pendant que les femmes prépareraient les lits. Ça bavarderait joyeusement sous les étoiles qui s'allumeraient une à une, l'oncle Rosaire se lançant, avec grands rires et claques dans les mains, dans la narration de ses voyages.
Puis, ma mère irait allumer les manteaux de la lampe Coleman dans la grande salle commune, ce qui annoncerait l'heure du coucher des enfants. Guidés par un adulte, nous irions tous faire nos pipis dans la bécosse entourée de fantômes, isolée de l'autre côté du ruisseau.
Puis là, nous irions nous blottir dans nos lits, entourés de nos cousins et cousines et nos mères viendraient nous border au milieu de nos fous rires.
Peu à peu, nous nous endormirions en rêvant aux parties de pêche, aux cueillettes de fraises sauvages et aux excursions à la montagne qu'on nous avait promises pour le lendemain.
Et moi, au milieu de tout ça, je nageais dans le bonheur. C'était une autre vie, un autre monde, un autre moi.
Où sont-ils donc partis tous ces gens que j'aimais tant? Je ne les reverrai donc jamais? Ils me manquent terriblement.
Et le Dieu de mon enfance qui était si présent dans nos vies, où est-il Lui?Est-ce ça le paradis perdu?
Publié par Jean Marcoux à l'adresse 14:15

Les p'tits bonheurs

Les p'tits bonheurs
Vendredi, le 27 février 2009

Lettre à Élaine et à tous ceux et toutes celles qui me sont chers,
Permettez qu’aujourd’hui, alors que s’étirent les longues journées d’hiver, je vous propose, bien naïvement je le crains, mes petites recettes de bonheur :
Cessez de vous poser la question : décrétez, une fois pour toutes, que Dieu existe et que, le soir de votre mort, Il vous accueillera, les bras grand ouverts, là-bas sur la ligne d'horizon.
Trouvez une conjointe douce et aimante et apportez-lui une rose tous les mois ou trouvez un conjoint compréhensif et fort et faites-lui de beaux enfants.
Prenez votre retraite et installez-vous à la campagne, sur le bord du fleuve.
Durant l'hiver, rêvez au jour où vous entendrez les cris rauques des corneilles vous annoncer le printemps.
Lorsque vous aurez fait une grande randonnée à skis et, qu'en fin de journée, vous aurez les mains et le visage rougis par le froid, mettez deux ou trois bûches dans l’âtre et, les pieds devant le foyer, buvez un grand verre de vin rouge en regardant pétiller le feu. Puis, somnolez un peu avant le souper. Ou étendez-vous sur le divan et dites à votre bien-aimée de venir se blottir dans vos bras.
En janvier, sortez pots, semences, terreau et arrosoir pour débuter vos semis.Au premier matin du printemps, ouvrez grand volets et fenêtres pour aérer la maison et prenez de grandes respirations.
Puis, descendez sur la grève qui borde les caps pour voir l'eau en ruisseler joyeusement en faisant dégringoler les congères dans un bruit de clochettes.
Le soir venu, allez rêver sous les millions d'étoiles pour ventiler votre âme et lui donner de l'ampleur.
Demandez à votre bien-aimée de vous faire une tarte aux pommes deux fois par mois et mangez-la chaude, nappée de crème glacée.
Ou demandez à votre conjoint de vous emmener sillonner les routes de l'île d'Orléans, arrêtez-vous à un kiosque pour acheter des framboises et demandez au paysan s'il est natif de l'île ou si la récolte est bonne cette année ou ce qu'il fait durant l'hiver. Parlez avec lui un bon quinze minutes et n'oubliez pas de payer vos framboises en partant.
À la fin de la journée, en revenant de l'île, empruntez la route du Mitan pour vous rendre de St-Jean à Ste-Famille. Roulez doucement et en silence, en regardant le soleil baisser sur les montagnes de la côte de Beaupré, pour vous imprégner de la beauté des lieux.
Les jours de pluie, lisez Jean O'Neil ou Jacques Poulin ou visionnez un vieux western de John Wayne ou de Gary Cooper.
Gardez parfois votre petit-fils à coucher à la maison et, avant qu'il n'aille se coucher, jouez avec lui une partie d'échecs en le laissant gagner. Les fois suivantes, quand viendra votre tour de gagner, soyez sur vos gardes car il ne vous laissera pas faire.
Avant qu'il ne s'endorme, lisez-lui un Tintin ou un Astérix et, lorsqu'il commencera à cligner des yeux, embrassez-le, couvrez-le, éteignez la lumière et tirez la porte mais laissez-la un peu entrebâillée. N'oubliez pas d'apporter le volume avec vous pour en continuer secrètement la lecture, à l'insu de votre femme.
Si c’est votre petite-fille qui couche à la maison, lisez-lui Winnie l’ourson ou Cendrillon pour l’endormir. Évitez Le petit chaperon rouge ou Le petit poucet : ça pourrait lui donner des cauchemars. Elle demandera un verre d’eau, babillera sans arrêt et trouvera toutes sortes de prétextes pour retarder votre départ. Soyez patients, les petites filles ont besoin d’être rassurées. Bien évidemment, embrassez-la, elle aussi, avant de fermer la porte à demi
............
Et si, par malheur, par très grand malheur, vous veniez à perdre votre compagne ou compagnon ou votre enfant ou petit enfant, alors, très vite, remisez ces petites recettes de bonheur au fin fond d'un placard. Puis, recroquevillez-vous, laissez se fendre votre cœur et que vos sanglots ameutent le quartier pendant trois jours.
Ou si l'on vous apprend qu'un enfant du Soudan est mort de faim ou qu'un petit Algérien a vu les extrémistes égorger sa mère, alors entrez dans une colère froide, ayez le goût de tuer à votre tour et levez le poing vers le ciel en criant de rage.
Au bout de ces trois jours, remémorez-vous ce Dieu de l'horizon qui accueillera vos morts et réussira peut-être à mettre du baume sur vos plaies et celles du jeune Algérien. Puis sortez timidement dehors pour permettre au soleil de sécher vos pleurs et réchauffer votre cœur.
Ainsi reviendra un peu de bonheur dans votre âme convalescente et pourrez-vous recommencer à lire, peut-être un peu tristement cette fois, ces petites recettes de bonheur.
Jean

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 21:38 3 commentaires

Les origines de l'homme

Mes ancrages - Capsule No 3
12 mars 2009

Les origines de l’homme

Dans la capsule No 1, nous avons vu que tous les atomes qui constituent la matière, y compris les atomes dont nous sommes constitués, ont été fabriqués au cœur des étoiles. Que ce sont ces atomes qui ont été dispersés dans l’univers pour se regrouper en de nouvelles étoiles, y compris notre soleil et ses huit planètes, incluant la terre.

Dans la Capsule No 2, nous avons vu la vie émerger graduellement sur notre planète : êtres unicellulaires, puis pluricellulaires. Dans les océans d’abord, sous forme d’invertébrés comme les éponges et les méduses, puis sous forme de vertébrés, tels les poissons apparus il y a environ 500 millions d’années. Puis, il y a 400 millions d’années, la vie marine s’est lancée à la conquête de la terre. D’abord des plantes puis des amphibiens qui ont trouvé le moyen de se hisser sur la terre pour l’envahir jusqu’à créer des dinosaures.

Et l’homme maintenant

Nous voilà rendus à examiner, sommairement je l’avoue, comment l’homme est venu s’insérer dans ce long processus d’évolution.

L’histoire qui conduit à l'homme d'aujourd'hui commence sur le continent africain, il y a une centaine de millions d’années, par de petits rongeurs qui apprennent à grimper aux arbres pour échapper à leurs prédateurs et même y trouver leur nourriture. Leurs mains et leurs pieds développent force et dextérité. Ce sont des primates, ancêtres des singes.
Il y a quelque trente millions d’années, les températures chutent sur le continent africain. La réponse à ce défi est un singe plus performant, doté d’une constitution plus forte et d’un cerveau plus performant. C’est le Proconsul. Ancêtre des grands singes, il préfigure les humains, il est notre plus proche cousin.

Il y a environ six millions d’années, un groupe de grands singes quitte la forêt et devient bipède. La position bipède libère les mains et donne une meilleure vision des proies et des ennemis. Ces grands singes commencent à utiliser des pierres et des bâtons pour se défendre de leurs ennemis, tuer leurs proies et les dépecer. Ils inventent des outils et même des outils en pierres taillées. Ce sont les Australopithèques. «Lucy» (chantée par les Beatles) dont le squelette datant de 3,2 millions d’années a été découvert en Éthiopie en 1974, est leur représentante. L’Australopithèque n’est pas encore tout à fait humain.

Le premier véritable humain est l'homo habilis. Il a un corps et un crâne beaucoup plus développé que l'Australopithèque. Son cerveau fait un peu plus de la moitié de celui de l'homme moderne.

Après le passage à la station verticale, après l'invention des outils de pierre taillée, la troisième innovation qui propulsa nos ancêtres jusqu'au stade de l'Homo sapiens, fut l'acquisition d'un corps doté d'une anatomie moderne, il y a environ 1,6 million d'années. C’est l’homme de Cro-Magnon. Le cerveau de l'homme de Cro-Magnon a triplé de volume par rapport à celui de l'Australopithèque.

Puis, dans le processus d’évolution, s’est inséré l’homme de Neandertal il y a environ 200,000 mille ans et qui a connu son âge d’or entre moins 50,000 ans et moins 40,000 ans. Puis, en quelque 10,000 ans, il fut submergé par le raz-de-marée des Cro-Magnon.

Les hommes de Cro-Magnon furent les premiers homo sapiens. Ils débarquèrent sur le territoire européen il y a quelque 40,000 ans. L’homme de Cro-Magnon possède déjà toute la panoplie des habiletés qui différencie l’humain des autres espèces : gravure, sculpture, peinture et, surtout, capacité de symboliser. De ne pas voir, par exemple, chez les animaux, uniquement une suite d’individus mais de percevoir l’espèce bovidé ou chien ou antilope et de la représenter symboliquement sur les murs de ses cavernes. D’admirer la nature qui l’entoure et de prêter un esprit à toutes les choses et bêtes, de prier, par exemple, l’esprit du cervidé avant de le prendre en chasse et de vénérer l’esprit lune qui éclaire ses nuits. Cette nouvelle perception des êtres et des choses se manifeste dans les magnifiques grottes, comme celles de Lascaux, il y a 10,000 à 30,000 ans. C’est la naissance de l’animisme (l’homme confère aux choses et aux bêtes une âme analogue à l’âme humaine). L’histoire va désormais s’accélérer : invention de l’agriculture il y a 19,000 ans, de l’astronomie il y a 5,000 ans, de la domestication des animaux, de l’alphabet et de l’écriture il y a 4,200 ans, de la géométrie et de la physique chez les Grecs il y a 2,000 ans, de la science expérimentale en Europe il y a 400 ans et ainsi de suite jusqu’à toutes ces inventions modernes comme l’automobile, l’avion, l’informatique, etc.

Cette évolution d’une sorte de singe anthropoïde vers l’humain s’est produite sur une période relativement courte de quelque six millions d’années (quand on la compare, par exemple, au règne des dinosaures qui s’est étendu sur quelque 180 millions d’années).

C’est Darwin et ses successeurs qui ont ouvert la voie à la compréhension de ce long processus d’évolution. Aujourd’hui, on peut dire que tous les scientifiques adhèrent à cette théorie de l’évolution hors les créationnistes qui s’en tiennent encore à une lecture littérale de la Bible. Aujourd’hui, on sait, par exemple, que 99% des gênes de l’homme sont identiques à ceux du chimpanzé.

Des gens comme Copernic et Galilée n’ont pas seulement fait des découvertes scientifiques remarquables en énonçant que la terre n’était pas le centre de l’univers. C’est une révolution culturelle qu’ils ont lancée car ils ont ébranlé des conceptions qui avaient cours depuis Aristote et qui faisaient de l’homme le nombril de l’univers.

Il en a été de même pour Darwin qui, avec sa théorie de l’évolution des espèces, a lui aussi lancé une révolution culturelle qui jetait bas une conception de la création de l’homme qui remontait aux temps immémoriaux de la Bible.

Il existe évidemment une multitude de publications sur l’évolution des espèces. Je me contente de citer Origines de Trinh Xuan Thuan et Une brève histoire des idées de Galilée à Einstein de Claude Boucher. Il y a eu aussi récemment sur la chaîne RDI une excellente émission sur Darwin dans la série Découvertes.

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 09:10

L'émergence de la vie

Mes ancrages - Capsule No 2
Janvier 2009

L’émergence de la vie

Je crois que l’homme est le produit de l’évolution et qu’il n’a pas été créé par le souffle de Dieu comme voudraient nous le faire croire les créationnistes qui font de la Bible une lecture littérale. Le paradis terrestre est un conte merveilleux sans doute écrit par un poète mais ce n’est qu’un conte. Voyons donc d’abord comment la vie a véritablement émergé sur la terre comme nous le racontent les scientifiques d’aujourd’hui.

Les briques de la vie
Dans un de ses livres intitulé «Poussières d’étoiles», Hubert Reeves dit que l’homme est véritablement poussière d’étoiles en ce sens que tous les atomes qui constituent la matière connue ont été fabriqués au cœur des étoiles.

Les notes qui suivent sont principalement tirées du magnifique livre «Origines» de l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan.

En effet, les étoiles sont essentiellement constituées d’hydrogène et d’hélium et, la nature a inventé ses étoiles pour transformer ces deux éléments de base en éléments lourds comme le carbone, l’oxygène, l’azote et le magnésium nécessaires à la construction de la vie. Puis, pour ensemencer l'espace de ces éléments, elle fait exploser les étoiles massives ou bien elle se sert du vent stellaire que soufflent les étoiles de moindre masse.

Les débris des étoiles disloquées se rassemblent alors sous l’effet de la gravitation pour donner naissance à de nouvelles étoiles et à des planètes.Les planètes sont ce que la nature a trouvé de mieux pour permettre l'émergence de la vie: une surface solide, de l'eau et une atmosphère protectrice, du moins chez certaines d’entre elles comme la terre.

En plus de fabriquer les éléments lourds qui sont les «briques de la vie», les étoiles fournissent lumière, énergie et chaleur pour éveiller et entretenir la vie.

Les multicellulaires et l’exubérance de la vie
La terre est vieille de 3,8 milliards d’années. Et, pendant 3 milliards d’années, la vie ne s’est discrètement manifestée que sous formes de bactéries et d’êtres unicellulaires. Ce n’est qu’environ il y a 750 millions d’années que la vie s’est montée en organismes multicellulaires. C’est dans la mer que la vie va prendre ce nouvel essor, à l’abri des rayons ultraviolets mortels qui ne peuvent pénétrer sous l’eau au-delà de quelques mètres. En surface, l’oxygène ne s’était pas encore formé pour permettre à la couche d’ozone de se développer pour protéger la terre des rayons ultraviolets solaires.

C’est ce passage des organismes unicellulaires aux organismes multicellulaires qui a donné un nouvel essor à la vie. Cette association des organismes unicellulaires a permis la spécialisation des fonctions et s’est révélée favorable à de nouvelles manifestations de la vie en faisant apparaître des êtres plus adaptés à leur environnement.

L’explosion de la vie

Il y a environ 540 millions d’années, pendant une période de 10 à 20 millions d’années, se produisit un big bang biologique qui engendra la diversification biologique la plus fantastique que la vie ait connue. Cette explosion biologique est probablement due à l’enrichissement en oxygène de l’atmosphère terrestre.

Les animaux emplirent alors les océans. Apparurent d’abord les invertébrés tels les éponges, méduses et vers. Et puis ce fut le tour des vertébrés, tels les poissons apparus il y a environ 500 millions d’années.

La planète fleurie

Il y a 400 millions d’années, la vie marine se lance à la conquête des terres. La couche d’ozone nouvellement constituée rendait la vie désormais possible sur les vastes étendues de pierres. En commençant par certaines algues marines qui inventèrent la vascularisation en développant dans leurs tiges des canaux qui permirent à l’eau et aux minéraux du sol de remonter des racines jusqu’aux autres parties du végétal. Les terres se couvrirent de marais abritant une végétation luxuriante.

L’émergence de la vie animale sur terre

Après les espèces végétales, c’est au tour des espèces animales de sortir de la mer pour envahir la terre.
Les dinosaures font leur apparition il y a quelque 245 millions d’années. Ils disparaissent il y a 65 millions d’années (comme les trois quarts des espèces animales) suite à l’impact d’un énorme astéroïde dans la péninsule du Yucatan au Mexique.

Les mammifères, apparus sur terre à peu près en même temps que les dinosaures, survécurent tant bien que mal à l’hécatombe. Ils développèrent une nouvelle stratégie de reproduction : au lieu de pondre des oeufs qui permettaient aux embryons de se développer à l’extérieur de leurs géniteurs, ceux-ci se mirent à incuber et développer leurs embryons dans leurs ventres. C’est ainsi que, en l’espace de quelques millions d’années, apparurent de multiples nouvelles espèces animales telles que chiens, chats, chevaux et surtout les singes, ancêtres de l’homo sapiens.

Dans la prochaine capsule, nous parlerons de l’émergence de l’homme.

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 15:12

Ma place dans l'univers

Mes ancrages - Capsule No 1
janvier 2009

Ma place dans l’univers

Je ne vous apprendrai rien si je vous dis que la terre n’est pas le centre de l’univers. On a pourtant longtemps cru que c’était le cas. Il faut bien admettre que, à première vue, tout semble tourner autour de nous : lune, soleil, étoiles et autres astres. Pas étonnant donc que nos ancêtres aient perçu leur astre comme le centre de l’univers. Il a fallu attendre jusqu’au XVIe siècle pour que de grands esprits comme Copernic et Galilée fassent un premier pas pour sortir du géocentrisme et placer le soleil au centre de l’univers, conception qui fut à son tour dépassée lorsqu’on découvrit l’immense troupeau (la Voie lactée) dont faisait partie le système solaire. Et encore plus dépassée lorsqu’on découvrit que l’univers était peuplé de milliards d’autres galaxies évoluant dans un cosmos vieux de plus de quatorze milliards d’années.

Déjà donc, je sais que je vis dans un univers dont mon imagination n'arrive pas à cerner les contours et que la terre n’en est pas le centre.

Je ne vous apprendrai rien non plus si je vous dis que l’homme n’est pas le nombril de l’univers. On l’a pourtant cru bien longtemps au point de penser que le Dieu tout-puissant qui avait créé l’immense univers entretenait un lien privilégié avec sa petite créature au point de lui apparaître dans le désert pour lui donner les tables de la Loi et même de lui envoyer son propre fils pour le sauver. Il n'y a pas de commune mesure entre l'immensité de l'univers et ces fables lilliputiennes.

On peut croire si l’on veut à la création du monde par un Être tout-puissant mais de là à croire qu’il intervient dans le quotidien de nos vies, il y un pas. Je peux comprendre que, devant les mystères de l’univers, l’homme ait senti le besoin de s’inventer un protecteur soucieux de son bien-être mais je crois, qu’aujourd’hui, il faut ranger ces conceptions au rang des légendes. Je ne rejette pas pour autant l’idée de Dieu, j’y reviendrai un autre jour, mais je ne crois pas à un Dieu interventionniste, un Dieu providence.

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 14:09

Introduction à «Mes ancrages»

21 janvier 2009

Chers amis,

Si l'on considère le bagage des connaissances que l'homme a graduellement acquises sur l'univers qui l'entoure, particulièrement depuis le dernier siècle, et de ma compréhension dans leurs grandes lignes de ces connaissances, je peux dire, je crois, que je me suis trouvé une niche dans cet univers.

C'est une niche bien fragile, j'en conviens, car la science est encore bien loin de nous offrir tous les tenants et aboutissants de l'univers.

Et il n'est pas dit non plus que de nouvelles découvertes ne viendront pas bouleverser les conceptions actuelles de nos hommes de science, comme Copernic, Galilée et Darwin l'ont fait dans leur temps et comme Einstein l'a fait au siècle dernier.

Malgré ces handicaps, je crois que ma perception de la place que j'occupe dans l'univers repose sur de solides ancrages. Plus solides en tout cas que ceux qu'offraient les anciennes mythologies qui faisaient intervenir une multitude de dieux et de déesses pour régir les phénomènes naturels tout en intervenant régulièrement dans les comportements des humains. Plus solides aussi que ceux que propose la Bible qui, à son tour, fait intervenir un Dieu punitif et vengeur pour remettre les humains dans le droit chemin. Plus solides même que les croyances qu'offre le christianisme avec ses miracles et ses multiples interventions divines héritées dans bien des cas de la mythologie.

J’entreprends donc aujourd’hui de vous entretenir dans mon blogue sur ma place dans l’univers, telle que je la conçois.

Comme le disait Hubert Reeves, l’homme se pose quatre questions fondamentales : D’où est-ce que je viens? Où est-ce que je vais, Qu’est-ce que je suis? (Et paraphrasant Woody Allen : Qu’allons-nous manger ce soir?).

Ce sont là ce que j’appelle mes ancrages. Je les aborderai par capsules, comme je le fais pour mes capsules astronomiques. Libre à vous de faire valoir vos propres vues et même de contester mes opinions. Je serais enchanté de lire vos courriels.

Au plaisir,

Jean Marcoux

L'assistance au suicide

L'assistance au suicide
lundi 15 décemre 2008

Dans son édition du samedi 13 décembre 2008, à l’occasion du procès très médiatisé de Stéphan Dufour, Le Soleil passe en revue certains cas célèbres d'assistance au suicide. Le sujet, qui revient périodiquement à la page, en est un qui me tient beaucoup à coeur. Voici donc mes vue sur la question.

Je pose comme prémisse que c’est à chacun qu’il appartient de décider ce qu’il veut faire de sa vie. Le suicide n’est pas, comme on le dit parfois, un débat de société. C’est une décision personnelle. C’est à moi et à moi seul d’en décider.

Il n’y a pas si longtemps, la tentative de suicide était un crime passible d’emprisonnement (le suicide réussi n’a jamais été un crime et pour cause). Depuis qu’on a décriminalisé la tentative de suicide, la société me dit que je peux me suicider et que c’est mon affaire. Bien. Mais si je suis dans un état de souffrance insupportable et impossible à soulager, que je veux y mettre fin par le suicide et que je ne peux pas le faire seul, niet, pas question de m’assister. Arrange-toi avec ton problème. La personne compatissante qui acceptera de le faire devient passible d’emprisonnement.

Cette défense de tendre la main au suicidaire me révolte depuis qu’un beau-frère s’est tiré un coup de chevrotine dans la bouche, que le cinéaste Claude Jutras s’est jeté dans le fleuve, que le fils d’une chère amie s’est précipité du haut du pont de Québec et que Doris Lussier est mort dans d’atroces souffrances. Pourquoi, bondieu, n’a-t-on pas pu offrir à ces gens de les aider à en finir si tel était vraiment leur désir? N’aurait-ce pas été là un geste de compassion élémentaire?

Entendons-nous bien, je ne veux pas dire que l’on doit offrir la mort à la carte, qu’on ne doit pas d’abord tenter de trouver d’autres voies que la «solution finale» mais, une fois ces pistes épuisées et face à la détermination du suicidaire, pourquoi, avec toutes les précautions voulues, ne pas faciliter le difficile passage vers la mort? La chose se fait ailleurs, en Belgique, en Suisse, dans les Pays-Bas et même dans certains étatats des USA, par exemple.

Sous couvert d’une morale dépassée, on ergote sur les dangers de dérapage, sur les risques hypothétiques qu’on en vienne à donner la mort sans le consentement de la personne et on occulte la détresse et la désespérance, bien réelles celles-là, de la personne qui n’en peut plus de vivre dans la souffrance physique ou psychologique.

Quel est donc ce raisonnement détraqué qui permet de mettre un terme à la vie naissante chez un fœtus sans, évidemment, son consentement (ce qui ne veut pas dire que je suis contre le libre choix, bien au contraire) et qui refuse d’assister la personne qui, elle, consentirait librement et lucidement à mourir?

Nos politiciens fédéraux vont-ils finir par décider de porter secours à leurs compatriotes qui hurlent leur souffrance et abolir une bonne fois pour toutes l’odieux article 241 du code criminel comme les incitait encore récemment Madame Francine Lalonde du Bloc Québécois?

Peut-être, pour s’en convaincre, devraient-ils visionner le magnifique film «La mer intérieure» d’Alejandro Amenábar ou les poignants témoignages de la vidéo «Mourir pour soi» de Lina B. Moreco?

Si on considère l’adoucissement des peines infligées depuis quelque temps par les tribunaux aux personnes coupables d’assistance au suicide, telles que rapportées dans Le Soleil, il semble bien que l’opinion publique est mûre pour l’abrogation de cet article 241.

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 13:21

L'enfer existe-t-il?

L'enfer existe-t-il?
vendredi 19 décembre 2008

Voici la version d'une question "bonus" de chimie posée à l'université de Nanterre. La réponse d'un étudiant a été si loufoque que le professeur l'a partagée avec ses collègues, via Internet, et c'est pourquoi vous avez le plaisir de la lire ....
Question Bonus: « l'enfer est-il exothermique1 ou endothermique2 » (1 : évacue la chaleur, 2 : absorbe la chaleur).
La plupart des étudiants ont exprimé leur croyance en utilisant la loi de Boyle (si un gaz se dilate il se refroidit et inversement) ou ses variantes.
Cependant, un étudiant eut la réponse suivante:
Premièrement, nous avons besoin de connaître comment varie la masse de l'enfer avec le temps.
Nous avons besoin aussi de connaître à quel taux les âmes entrent et sortent de l'enfer. Je pense que, à cet égard, nous pouvons assumer sans risque qu'une fois entrées en enfer, les âmes n'en ressortiront plus. Du coup aucune âme ne sort.
De même pour le calcul du nombre d'entrées des âmes en enfer, nous devons regarder le fonctionnement des différentes religions qui existent de par le monde aujourd'hui. La plupart de ces religions affirment que si vous n'êtes pas membre de leur religion, vous irez en enfer. Comme il existe plus d'une religion exprimant cette règle, et comme les gens n'appartiennent pas à plus d'une religion, nous pouvons projeter que toutes les âmes vont en enfer...
Maintenant, regardons la vitesse de changement de volume de l'enfer parce que la Loi de Boyle spécifie que « pour que la pression et la température restent identiques en enfer, le volume de l'enfer doit se dilater proportionnellement à l'entrée des âmes ».
Par conséquent cela donne deux possibilités: 1) si l'enfer se dilate à une vitesse moindre que l'entrée des âmes en enfer, alors la température et la pression en enfer augmenteront indéfiniment jusqu'à ce que l'enfer éclate. 2) si l'enfer se dilate à une vitesse supérieure à la vitesse d'entrée des âmes en enfer, alors la température diminuera jusqu'à ce que l'enfer gèle.
Laquelle choisir ?
Si nous acceptons le postulat de ma camarade de classe Jessica m'ayant affirmé durant ma première année d'étudiant « Il fera froid en enfer avant que je couche avec toi » et en tenant compte du fait que j'ai couché avec elle la nuit dernière, alors l'hypothèse doit être vraie. Ainsi, je suis sûr que l'enfer est exothermique et a déjà gelé …
Le corollaire de cette théorie c'est que comme l'enfer a déjà gelé, il s'ensuit qu'il n'accepte plus aucune âme et du coup qu'il n'existe plus... Laissant ainsi seul le Paradis, et prouvant l'existence d'un Etre divin ce qui explique pourquoi, la nuit dernière, Jessica n'arrêtait pas de crier "Oh....mon Dieu !...." (Cet étudiant est le seul ayant reçu la note 20/20).

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 14:53

Retour vers le futur

Retour vers le futur
Dimanche, le 11 janvier 2009

Ma douce Jeannette,

Te souviens-tu de ce que criaient les chauffeurs d’autobus de notre jeunesse lorsqu’ils ouvraient les portes de leur car déjà bondé à craquer pour accueillir les gens frigorifiés qui attendaient le long du trottoir? «Avancez en arrière!» répétaient-ils à leurs passagers entassés à l’avant. Et il y avait toujours un farceur pour ajouter : «On donne des calendriers!».

Et toi, aujourd’hui, tu m’as souvent dit que tu aimerais bien «avancer en arrière», remonter les pages de ces faux calendriers d’autobus et te retrouver cinquante à cent ans en arrière pour jeter un œil de voyeuse sur la vie que menait ta mère dans le fond du rang de la Présentation, à quelques kilomètres de Saint-Hyacinthe. La voir, encore jeune fille, aidant sa mère à servir le dîner aux cinq ou six «engagés» de ton grand-père pour lui donner le coup de main au moulin à scie et ne manquant pas de taquiner ou lancer des œillades à la belle Antonia timide et rougissante.

Aimerais-tu vraiment ça?

Écoute, c’est faisable.

Il faut d’abord, pour te guider dans cette entreprise, que je te rappelle quelques notions tirées de mes connaissances pseudo-scientifiques :

Primo, tu sais que la lumière voyage à des vitesses incroyables : 300 000 kilomètres (sept fois le tour de la terre) à la seconde. À la seconde, t’imagines-tu?

Si tu pouvais t’installer sur le soleil (ouille mes fesses!) et décrocher un rayon de ton soleil vers la terre, ce rayon prendrait huit minutes à atteindre son objectif. C’est donc dire que, comme les rayons du soleil prennent huit minutes à atteindre la terre, nous, postés sur la terre, voyons en quelque sorte le soleil avec huit minutes de retard. Lorsque tu vois le sommet du capuchon du soleil matinal se pointer sur la ligne d’horizon et que tu t’écries «Regarde, il est sept heures et le soleil se lève!», eh bien, il s’est déjà levé huit minutes plus tôt, à 6h52, le cachottier. Inversement, si tu étais assise sur le soleil, l’image de la terre qui se refléterait sur la rétine de ton œil aurait huit minutes de retard sur la réalité.

Secundo, les distances entre les astres de l’univers sont tellement grandes qu’on se sert souvent de la vitesse de la lumière pour les mesurer. C’est ainsi que l’on dira du soleil, qu’il est à 150 millions de kilomètres de la terre ou à huit minutes-lumière. La distance entre la terre et les astres plus éloignés sera calculée en «années-lumière». Sirius, l’étoile la plus brillante, est à plus de huit années-lumière de nous. En d’autres termes, lorsque, par une belle nuit noire, tu contemples cette étoile et que tu t’écries «Regarde, la belle Sirius est là!», eh bien non, elle n’est pas tout à fait là : elle était là il y a huit ans et sept mois. (Et encore là, c’est l’une des étoiles les plus près de nous).

Alors, après tout ce grand détour, si on en revenait au rang de la Présentation et à la jeune Antonia occupée à servir le ragoût de boulettes aux «engagés» de ton grand-père. Elle a quinze ans. Comme elle aurait 105 ans aujourd’hui, il s’agit, pour la voir à l’âge de quinze ans, de reculer dans le temps de 90 ans.

Comment peut-on faire ça?

Il suffit simplement de s’installer sur un astre distant de 90 années-lumière de la terre et, avec un télescope, très très puissant il va sans dire, de faire la mise au point sur la terre d’abord, puis sur l’Amérique du Nord, puis sur ce pays voisin du Québec qu’on appelle le Canada, puis sur le Québec lui-même, puis d’affiner ta mise au point sur le rang de la Présentation. Rendue là, il te sera facile de localiser la maison paternelle et alors ton super-télescope te permettra de voir, par la fenêtre, passer et repasser la belle Antonia de quinze ans, occupée à servir la table.

Tu me suis, n’est-ce pas? Comme l’image de ta mère prend 90 ans à atteindre l’astre sur lequel tu seras postée, l’image qui viendra frapper ta rétine sera celle de la scène qui se déroulait il y a 90 ans. Si tu restes l’œil collé à l’oculaire de ton télescope tu verras alors se dérouler toute la vie de ta mère mais toujours avec 90 ans de décalage, donc depuis l’âge de quinze ans jusqu’à sa mort.

Je te suggère de t’installer sur l’étoile Sadalachbiah. Cette étoile porte un nom un peu bizarre, je te le concède, mais elle a le grand mérite de se balader à plus ou moins 90 années-lumière de la terre. Je ne pense pas que tu aies le mal du pays durant ton séjour là-bas car, en dépit des quelques millions de milliards de kilomètres qui nous séparent de l’accueillante Sadalachbiah, celle-ci fait partie de la voie lactée, notre propre galaxie. C’est une proche voisine.
Je ne te cache pas que, pour arriver à tes fins, il te faudra résoudre quelques petits problèmes techniques.
Il faudra d'abord trouver un moyen de te rendre sur ton étoile subito presto. Tellement vite que même si tu arrivais à te déplacer à la vitesse de la lumière, ça ne suffirait pas : le temps de te rendre (90 ans) et les images que tu recueillerais sur l’oculaire de ton télescope seraient les images d’aujourd’hui car les images venant de la terre auraient voyagé à la même vitesse que toi. Non, il faudra que tu trouves un moyen de te transporter «instanter» sur Sadalachbiah. Je crois que le seul moyen est la téléportation. Je ne sais pas très bien comment fonctionne cette technique mais, si je comprends bien, elle te permettrait de te transporter instantanément, corps et âme, à l’autre bout de l’univers. Tu pourrais peut-être visionner quelques scènes de «Star Trek» ou de «La guerre des étoiles» pour te familiariser avec cette technique.

Il y a aussi le télescope. Il te faudrait sûrement consulter les experts qui ont installé le fameux télescope Canada-France-Hawaï, équipé d’une lentille de 3,6 mètres de diamètre, sur le sommet du mont Mauna Kea, à Hawaï.

N’oublie pas non plus de demander aux experts de la NASA de te fabriquer un bouclier thermique que tu glisseras sous tes fesses avant de t’installer sur ta Sadalachbiah. Même si celle-ci se montre accueillante, il ne faut pas oublier que c’est une étoile et que les étoiles ont la vilaine habitude de développer une température de quelques millions de degrés.

Évidemment, si tu voulais «avancer plus loin en arrière» pour visionner la vie de tes aïeux, il te faudrait trouver des étoiles encore plus éloignées de la terre.

Je pense que tu as là l’essentiel des techniques et matériaux dont tu auras besoin pour réaliser ton projet que je trouve très louable car il témoigne d’un amour filial remarquable.

Surtout, n’oublie pas de venir me faire la bise avant de partir.

Tendresse,

Jean

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 12:37 1 commentaires

L'effet papillon

L'effet papillon
samedi 21 mars 2009

Mes chères Jeannette et Fernande,

Je vous dédicace ce texte pour bien vous faire comprendre ce qu'est l'effet papillon que vous n'avez pas semblé avoir pigé malgré la démonstration éclatante qui en était faite dans le film «L'effet papillon» que nous avons vu l’hiver dernier. Voici donc le scénario que j'ai ébauché pour vous.

Supposons que, au sortir du cinéma, vous ayez courageusement décidé de m'accompagner pour nous rendre tous trois à la voiture plutôt que de me laisser affronter seul le temps froid en m'attendant frileusement à la chaleur comme vous l’avez fait.

Il faut, dès lors, prendre conscience que, si vous m’aviez accompagné à la voiture, ce léger changement dans notre comportement aurait pu à tout jamais changer le déroulement de nos vies. Il y aurait forcément eu un décalage horaire, ne serait-ce que de quelques minutes ou même de quelques secondes, dans ce déroulement : nous aurions marché un peu plus lentement pour nous rendre à la voiture, je vous aurais ouvert les portières, etc.

Donc, nous n'aurions pas quitté le terrain de stationnement tout à fait au même moment. En conséquence, les voitures que nous aurions croisées, les feux de circulation sur notre route ou les piétons qui auraient traversé la rue devant nous, n'auraient pas été les mêmes. Nous ne serions pas arrivés à la maison au même moment. Vous n'auriez peut-être pas flirté honteusement avec notre jeune portier comme vous l'avez fait. Je ne serais pas allé reconduire Fernande chez elle exactement à la même heure. Je me serais peut-être embourbé dans la neige mais pas exactement au même endroit, etc., etc.

De tout ceci, il faut bien comprendre deux choses: Primo, le déplacement d'une pièce de nos vies, si minime soit-il, entraîne le déplacement de toutes les autres, comme un jeu de dominos. Deuxio, il est impossible de reproduire exactement les mêmes comportements et les mêmes événements à deux moments différents. Il y aura immanquablement des différences, si petites soient-elles.
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Maintenant, voyons un peu quels auraient pu être les changements dans le cours de nos vies si vous étiez venues avec moi à la voiture en sortant du cinéma. Je vais illustrer de façon dramatique (mais ô combien réaliste) ces changements.

Supposons que, au retour, un chauffard nous soit entré dedans;
Que son pare-chocs ait violemment heurté ma portière;
Qu’il m’ait blessé sérieusement au point de déclencher une hémorragie cérébrale;
Que j'aie été hospitalisé au Jeffrey Hale avec le diagnostique «légume pour la vie»;
Que vous soyez venues, à tour de rôle, me faire manger ma petite soupe à la cuillère;
Que vous ayez engueulé un infirmier qui m’avait bousculé et que, pour se venger, il ait mis du poison dans ma soupe;
Que, aux funérailles, Fernande ait rencontré un de mes anciens confrères plein aux as;
Supposons qu'elle l'ait entortillé au point où le bonhomme l'aurait demandée en mariage et l'aurait emmenée à son ranch de Floride;
Que, à moitié morte de chagrin d'avoir perdu coup sur coup son mari et sa grande amie, Jeannette soit entrée chez les sœurs à cornettes;
Que, rendue là, Jeannette ait à son tour séduit le vieil aumônier riche à craquer lui aussi à force de voler l'argent dans le tronc des pauvres;
Supposons qu'ils aient alors défroqué tous deux;
Que Jeannette ait alors emmené son vieux curé en Floride pour rejoindre son amie Fernande;
Que, une fois sur place, vous vous soyez faites honteusement avantager toutes deux par vos riches conjoints;
Supposons que, maintenant riches, vous ayez plaqué vos vieux et vous soyez installées dans une riche villa sur le bord de la mer;
Que vous ayez alors fait venir mes cendres pour les enterrer dans votre jardin de pissenlits;
Que, dès lors, vous passiez là le reste de vos jours à recevoir vos gigolos et à écrire vos mémoires sur le temps où nous formions un heureux trio.
Supposons, supposons … ça n'a pas de fin, comme vous le soupçonnez sans doute.
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Saisissez-vous maintenant la signification de l'effet papillon?

J'espère que mes sages propos ne vous donneront pas des idées malsaines.

Affection,

Jean

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 12:07 0 commentaires

Les gangsters

Les gangsters
Vendredi, le 2 janvier 2009

Bonjour Fernande,

Maintenant que tu as fini de lire le livre que Jeannette a emprunté pour toi, il faut le rapporter à la bibliothèque sans quoi, toi l’éternelle délinquante devant Dieu et devant les hommes, tu iras en prison.

Si ça arrive, je t'apporterai une grande baguette de pain que j'aurai fait cuire avec une lime au milieu pour scier tes barreaux. Puis, à Pâques, je t'apporterai un gros gâteau dans lequel Jeannette aura fourré une mitraillette et quelques grenades. Puis aussi, une boîte de chocolats au "pot" pour acheter les gardiens. À la Saint-Jean, nous t'attendrons au bas du mur avec une grosse limousine noire blindée et nous descendrons au Mexique avec nos verres fumés et, dans le coffre, plein de cadavres de douaniers et de caissiers des banques que nous aurons dévalisées en descendant.

Sur place, nous irons voir des plasticiens et toi, tu deviendras Marilyn Monroe ressuscitée et Jeannette deviendra Brigitte Bardot rajeunie. Quant à moi, je deviendrai le légendaire Elvis Presley. Nous partirons un commerce d'autographes mais ça ne sera qu'une façade pour cacher nos activités dans la drogue, la prostitution et la vente d'armes. Avec tout l'argent que nous encaisserons, nous lancerons un concours pour l'assassinat de tous les êtres dangereux ou nuisibles de la planète, en commençant par George Bush et Robert Mugabe. Peut-être aussi une balle perdue pour Stephen Harper. On inscrira nos noms au temple de la renommée, à côté des grands bienfaiteurs de l'humanité comme Batman et Terminator.

Puis, quand nous serons vieux, nous monterons à bord d’un des navires de contrebande de Paul Martin pour revenir au Québec, juste à temps pour monter sur notre banquise qui nous amènera dans les Îles de Sorel (ça, je te l’expliquerai une autre fois).

Mais va pas te monter la tête avec ce beau programme et n'oublie pas de rapporter le livre à la bibliothèque.

Salut, criminelle en devenir,

Le complice

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 12:24 0 commentaires

Le pantalon

Lettre à ma fille

lundi 1 décembre 2008

Ma chère Marie-Claude,

Hier, dimanche, ta mère et moi sommes descendus à pied au Marché du Vieux-Port. Quand nous passions près des grands édifices, le vent nous assaillait férocement. Heureusement, j'avais mon chapeau Tilley avec oreilles et rabat sur le front. Ta mère avait son gros «coat de pouelle».

En passant à côté de l'église St-Jean-Baptiste, nous sommes entrés, moitié pour nous réchauffer et moitié parce que ta mère avait envie de voir le marché aux puces au sous-sol. J'ai acheté trois paires de bas à 5,00$ pour les trois. Je les ai coincés dans mon blouson, faute de poches assez grandes.

Puis, nous nous sommes rendus, frigorifiés, au Marché du Vieux Port. Plein de monde. Nous avons fait le tour sans rien acheter. Ta mère a ramassé quelques feuillets de recettes sur le veau de Charlevoix. Elle ramasse souvent des recettes comme ça mais ne les utilise jamais. Je pense que ça lui donne bonne conscience. Même si elle voulait les utiliser, elle ne le pourrait pas car elle les fourre pêle-mêle dans ses tiroirs où il devient impossible de les retrouver. Ça fait rien, je l'aime comme ça ta mère.

Puis, direction Petit Champlain. En passant sur la rue Saint-Paul, beau magasin de vêtements pour dames. Tu connais ma cliente: terminus, tout le monde descend. Après quelques taponnages, découverte d'un super beau pantalon, doublé ma chère et s'harmonisant tout ce qu'il faut avec le «coat de pouelle». Mais s'harmonisant mal avec le compte de banque de ma douce: 255$ avant taxe. Crise de conscience aiguë. On quitte ces lieux maudits, la mort dans l'âme mais les dollars dans le portefeuille.

Il approche 15h00 et nous avons l'estomac dans les talons, ce qui n'empêche pas cette chère âme de lorgner du côté des boutiques sur notre route et même d'entrer dans quelques-unes pour rechercher ce pantalon béni des dieux. Enfin, nous arrivons presque à genoux au resto «Sous-le-Fort» dans la rue du même nom. Pour débuter, petit verre de vin rouge descendu du ciel pour nous couler dans la gorge pendant que nous nous soufflons dans les mains pour les dégeler. Puis, nous commandons une cipaille avec 2 assiettes. Bien nous en prit car c'est copieux. C'est tellement délicieux que ta mère en oublie ses recettes au veau et décrète que la prochaine fois que nous recevrons du beau monde, c'est ici que nous viendrons chercher notre repas, en faisant croire, bien entendu, que c'est un mets maison. «T'as pas honte, menteuse!», que je lui lance. J'ai droit à un petit «Pfiou!», méprisant. Elle n'a pas de morale, cette femme-là.

Bien repus, nous repartons affronter le temps froid. Pas longtemps. Juste de l'autre côté de la rue, une magnifique boutique de vêtements pour dames que ta mère connaît bien. Je m'assois dans un confortable fauteuil pendant que madame fait la causette à la vendeuse en lui expliquant qu'elle recherche un pantalon comme celui que sa belle-soeur, celle qui a marié Raymond, le frère de son mari, celui qui est assis là dans le fauteuil, a trouvé au Carrefour Laval, au nord de Montréal où nous habitions avant d'acheter une maison à Cap-Santé où nous avons vécu dix ans avant de venir nous établir à Québec, au Montmorency, dans un appartement que nous aimons bien, situé à côté des Plaines où il fait très froid l'hiver, surtout qu'elle-même est très frileuse des fesses et c'est pourquoi elle cherche un pantalon doublé pour aller sur les Plaines où elle va souvent marcher seule quand son mari ne veut pas l'accompagner. (As-tu vu la circonlocution pour envelopper le sujet sans jamais perdre de vue l'objectif ultime qui était le pantalon doublé? Y a du génie là-dedans).Le magasin ne tient pas de pantalons doublés. Mais ça fait rien, la vendeuse était charmante.

Presque à côté, il y avait ce magasin de verre soufflé et coloré. Ta mère a acheté une jolie petite pièce pour pendre des clés. C'est un cadeau pour toi qui as déjà plus de ces porte-clefs que tu n'as de clefs. Et moi, j'ai fait sortir ta mère du magasin pour lui acheter un petit quelque chose d’aussi joli qu'inutile. Elle est sortie en me disant qu'elle allait voir les magasins vers la droite. Elle est partie vers la gauche. Après quinze minutes, j'ai failli lancer un avis de recherche.

Nous sommes remontés sur la terrasse Dufferin par le funiculaire. Il était près de 16h30 et la ville était magnifique sous les lumières. Nous tenant par la main, nous avons pris la direction de la rue St-Jean pour aller chez Simon's voir s'il y aurait là le fameux pantalon. Petit croche vers la côte de la Montagne pour jeter un coup d'oeil à la galerie «Le chien d'or» où l'on expose des toiles de Denis Nolet, le peintre dont j'ai utilisé une des toiles dans mon «Épitaphe pour une brouette»*. Il fait vraiment de belles choses, ce peintre. Des toiles aux couleurs vives, pleines de merveilleux. C'est pas donné. Jusqu'à 2000$. Nous avons causé avec la jeune galeriste à l'accent anglais et, lorsque nous lui avons dit que nous connaissions Denis Nolet, elle est allée chercher d'autres toiles à l'arrière et nous a donné deux belles cartes postales de lui.

*Épitaphe pour une brouette. Éd. De la Francophonie.

Arrêt dans une autre boutique où il n'y a pas le pantalon recherché mais où nous engageons conversation avec la jeune vendeuse qui, d'une chose à l'autre, nous apprend qu'elle étudie en littérature. Elle vient de Chibougamau et s'appelle Lisa Perron. Ta mère lui apprend que je viens de publier alors que je prends un air faussement modeste. Elle se déclare très intéressée. Je lui remets mon carton publicitaire. Elle promet d’acheter mon livre. J'offre de lui vendre à 15$ puis, sorti du magasin, je reviens sur mes pas et lui dis que je le lui donnerai si elle passe le prendre chez moi. Je suis comme ça moi, toujours à l'affût de la bonne affaire.Puis, nous prenons bravement la route de retour, pour de bon cette fois. Ta mère me dit qu'elle a l'intention d'aller fouiner aux centres d'achat pour son pantalon et même de retourner rue Saint-Jean voir ce fameux pantalon à 255$ + taxes.
Arrivée à la maison, elle sort de sa penderie une culotte en polar qu'elle vient me montrer. «Tu sais, dit-elle, si je mets ça sous le pantalon beige que j'avais cet après-midi, ce sera bien assez chaud et je n'aurai pas besoin de dépenser pour m'acheter un nouveau pantalon» ... Je l'aime quand même, tu sais, cette femme aux retournements imprévisibles.
Moi, en arrivant je déboutonne mon blouson ... j'avais perdu les trois paires de bas que j'y avais coincées.

Ce fut, malgré tout, une bien belle journée.

Je t’embrasse,

Papa

P.S.: Je ne t'ai pas dit le dénouement de l'histoire du pantalon de ta mère. Tu sais quoi? ... Cet après-midi, au Centre d’achats, elle se l'est acheté ce pantalon. En vente à $49, tu peux pas laisser passer ça
.
Publié par Jean Marcoux à l'adresse 08:51
2 commentaires:
Marcelle Bouchard a dit…Cher Gulliver,
J'aime bien ce petit mot à Marie-Claude.Je continue maintenant ma lecture et j'essaie de ramasser ces petits papiers froissés tout en ayant la tête dans les étoiles.
à bientôtEugénia
1 décembre 2008 20:52 Marie-Claude a dit…Cette nouvelle me fait toujours rire aux éclats! Je reconnais très bien maman même si elle prétend ardemment le contraire. Chère maman, c'est vrai qu'on l'aime comme ça!Je me réjouis toujours de constater à quel point tu apprécies les petits gestes du quotidien qui nous apportent tant de bonheur. Pour cela, et pour bien d'autres choses bien sûr, tu es un exemple à suivre.Ta fille qui t'aime11 décembre 2008 15:32

Publié par Jean Marcoux à l'adresse 12:58 0 commentaires
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